De l'art du contretemps

Day 882, 05:31 Published in France France by Ivan Dusaiks

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« Oui, maître ! » Comme un parfum de déjà vu ?


S'il y a bien un art dans lequel les politiques français semblent plus que passés maitre, c'est bien celui du contretemps. Et pas au sens courant du terme, mais bien au sens musical, autrement dit, l'art de ne jamais faire ce qui devrait être fait en temps voulu, mais toujours avec un temps d'avance ou un temps de retard.

Le meilleur exemple en est tout le brouhaha qui, depuis deux jours, agite la presse, au sujet de nos relations internationales, et plus particulièrement en ce qui concerne nos relations à l'alliance PHOENIX. Une poignée d'arrivistes milite pour l'adhésion. Soit. D'autres encore s'amusent à manipuler les chiffres, tels X-le-variable, en prenant trois exemples uniques de batailles bien choisis, au mépris de tout ce que l'on enseigne en sciences humaines à tous les première année, à savoir que l'on fait dire à peu près tout ce qu'on veut aux statistiques, y compris une chose et leur contraire. D'autres enfin le font pour une raison encore plus surprenante, c'est l'argument sentimental.

Et je dois dire qu'en tant que vieux roublard du monde politique, je ne manque jamais de m'étouffer face à ce genre de considérations quasi mystiques, purement émotionnelles ; fonder nos rapports avec les autres équipes nationales sur de seules affinités, c'est s'exposer au principe même de l'émotion, à savoir leur extrême volatilité, pour ne pas dire variabilité ou instabilité. Rejoindre phoenix par pure reconnaissance ou parce qu'ils seraient nos amis, c'est jouer le jeu de la diplomatie, mais du mauvais côté, celui du manipulé au lieu d'être l'agent du changement salvateur.

Qu'on ne s'y trompe pas, si en façade les alliances semblent primitivement reposer sur de bonnes amitiés un peu franchouillardes entre élites dirigeantes de chacun des pays en question, il s'agit d'abord et avant tout d'intérêt personnel bien compris, et il serait fâcheux que nous renoncions au nôtre par éternelle gratitude. Que l'on sorte les chiffres de dégâts qui nous plaisent pour prétendre démontrer sa préférence, à partir d'exemple triés sur le volet, comme l'on choisit de braves militants pour se faire acclamer dans un supermarché, ou que l'on avoue plus franchement son penchant sentimental, l'on ne s'expose qu'à n'user, à terme, que de la diplomatie des courbettes, vaseline en option – tant qu'à faire autant se pencher pour quelque chose –, et en la matière, la France a largement et plus que suffisamment donné lors des derniers mois du règne de l'ancienne alliance PEACE gc. Autant dire que le rôle de serviteur a déjà été largement expérimenté par les moins nouveaux d'entre nous.

Débarrassés de cette propagande pseudo pro-amitié superflue, venons en au fait, à savoir le caractère totalement surprenant et décalé des incitations à l'adhésion un tant soit peu sérieuses.

Le fait est, personne ne le niera, qu'il y aurait eu une période favorable pour rejoindre cette alliance, et lorsque je dis favorable, cela signifie en mesure d'apporter un avantage concret et mesurable, une contrepartie à ce qui, il faut bien l'avouer, reste une entrave à notre liberté diplomatique. Cette période propice a été les mois de décembre et de janvier, lorsque nous avions un pays menacé d'invasion imminente, ce qui s'est en définitive réalisé, parce qu'à cette époque l'adhésion nous aurait apporté un plus grand potentiel de défense, par l'attribution de priorités plus élevées pour nos propres batailles. L'on s'entendait dire régulièrement « vous n'êtes pas membres, vous passerez donc après » ; en elle-même cette attitude a sa cohérence, même si, comme on l'a vu, elle a bel et bien fini par mettre en danger de mort l'un des membres fondateurs de phoenix, la Hongrie, par le passage sans péage de la Croatie vers ses colonies asiatiques, ce qui a sans doute au passage bien plus motivé nos chers alliés à mettre un peu le paquet dans la libération de nos régions, par lesquelles il aurait fallu passer pour ce faire que toutes les promesses torrides de calins à venir.

Mais ce court intervalle est bel et bien passé, pour l'excellente raison que nous sommes déjà libres, ou du moins que nous avons un territoire suffisant pour se permettre ce genre d'affirmations. Reste deux propos en balance. Tout d'abord, « si nous rejoignons phoenix, Rhône Alpes sera libérée dans la semaine qui suit », et, par-delà l'aspect foncièrement comique, presque digne du Marabout du coin qui nous promettrait de ramener femme, enfant, chien et argent dans les 48h, c'est une fois de plus nier le moteur fondamental de la diplomatie qu'est l'intérêt personnel, et il est à peu près certain que si nous mettons face à face les propositions « aider la France » et « couper la paire des polonais », cette dernière l'emporterait à coup sûr ; la conjonction éventuelle des deux n'est que fortuite et ne doit pas nous induire en erreur.

Le dernier argument reste celui de notre défense territoriale, mais d'une part, nos ennemis sont pour l'heure dans l'incapacité absolue de mener une grande campagne offensive, et ce pour un certain temps qui doit se mesurer en mois ; l'Espagne ruinée, son fer ne valant même plus les larmes pour le pleurer, et la Pologne ayant opéré des retraites stratégiques dans chacune de nos régions depuis sa défaite de Paris pour mieux défendre ce que l'on appelle à tort « le » Rhône-Alpes (sans article, merci), qui n'est rien moins que sa source principale de revenus, en sont les témoins les plus probants ; d'autre part, l'expérience de mort imminente de la Hongrie sur ses colonies d'orient, seront des sources de motivations bien plus fiables et puissantes que toute promesse de vassalisation, fut-elle soumise à souhait.

De fait, l'adhésion à phoenix ne peut avoir actuellement qu'un seul sens, et c'est celui de renoncer à une part de notre liberté diplomatique, la liberté qui jusqu'ici nous a permis de déterminer nous-même s'il était ou non dans l'intérêt de notre équipe de participer aux campagnes de nos alliés, et, au regard du mépris dont est souvent victime la France, cette liberté a bien plus de valeur quand on sait qu'elle nous permettrait des rapprochements insolites et novateurs, confer le cas américain, que de vagues promesses lors de la signature d'une adhésion définitive, sur laquelle on ne pourrait revenir.

A de nombreuses reprises je me suis exprimé en faveur de cette alliance, et si mes préférences n'ont pas changé, je crois sincèrement qu'il est trop tard, ou trop tôt, pour renoncer à tous nos avantages contre un bouclier imaginaire. La coopération est évidemment nécessaire, si ce n'est indispensable, mais l'adhésion ne peut qu'à terme nous reconduire dans toutes nos servitudes, quand une décision plus mesurée et moins définitive pourrait bien, à terme, nous sauver la mise.

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