Acta est fabula

Day 2,597, 14:02 Published in France France by Hans.Bauer


Salve (bande de noobi) !

Premièrement youhou, j’ai un peu refait ma charte graphique, la précédente ne me déplaisait pas par son aspect « historique », parce qu’un beau tableau en rapport avec le thème ça fait toujours plaisir, mais par contre je ne la trouvais pas assez… moderne. Celle-ci me plait déjà mieux par sa modernité, et puis j’ai pensé lauriers, aigle, doré, à mon avis ce sont les ingrédients principaux du succès ! Bref, si vous avez des suggestions à ce sujet je suis preneur, je pense que tout est perfectible, et moi je n’hésite pas à remarquer mon manque de créativité, donc voilou dans vos 25 commentaires (huhu) je vous laisse vous exprimer.

Mais bon, après cette longue intro pour dire que j’ai changé deux trucs graphiques pourris, abordons le fond de notre affaire. Vous le savez sans doute, parce que vous suivez l’actu romaine tous les jours, cette année avait lieu la commémoration du deuxième millénaire du règne d’Auguste, hé oui et pourtant TF1 ne l’a pas annoncé en fanfare à son JT de 13h présenté par l’inénarrable J.-P. Pernault, comme quoi on vous cache bien des choses. Donc moi je vous dis les faits, je vous révèle la vérité et j’ai même pas peur. A l’occasion de cet événement, je vais vous montrer pile poil avant la deadline (parce qu’en 2015 Auguste sera mort depuis… 2001 ans) quelques aspects du personnage, qui n’était pourtant pas un joyeux drille.



Auguste, tout d’abord, ce n’est pas son prénom. Ce n’est même pas son nom de famille ! Le bonhomme nait en effet Caius Octavius en 63 av. J.-C. sans que ses copains ne se moquent de lui car eux-mêmes n’ont pas de prénom moins moisi (Cnaeus, Mettius, Nonus…). Sa famille est de rang équestre, ce qui veut dire qu’ils ne sont pas pauvres mais ils ne sont pas non plus dans l’hyperclasse romaine ; le père d’Octave, Caius Octavius (qui manquait un peu de créativité pour trouver des prénoms), est un homo novus (« homme nouveau », aucune information sur son orientation) qui accède le premier dans la famille au rang sénatorial. Le père d’Octave meurt cependant lorsque celui-ci a quatre ans, et donc l’éducation du jeune homme est confiée à sa grand-mère Julia. Julia ? Hmm un rapport avec un certain Jules ? Eh oui certains suivent : Octave est bien le petit-neveu de Jules César (par sa mère), et pas son fils comme on peut parfois l’entendre.

De sa jeunesse, il faut retenir que le jeune homme est vite pris sous son aile par César et que cela améliore très vite ses opportunités de carrière. Oui on peut parler d’un « petit-neveu à son grand-oncle » du coup, il entre dans les collèges pontificaux les plus select, il passe son cursus honorum les doigts dans le nez, se fait plein de potes jeunes et bêtes comme lui, bref c’est un étudiant qui mène la belle vie comme on peut en trouver sur certains bancs de la fac.

La tête à claque par excellence

Le seul truc qu’il ne gère pas est la vie militaire, il est en effet un peu freluquet. A la mort de César en -44, le testament de tonton le proclame pourtant son héritier principal et son fils adoptif (et c’est de là que vient la confusion, petits sapajous).


Octavien (on l’appelle comme ça après la mort de César pour notifier le changement de dimension du personnage) n’est pas le plus fort pour les batailles, mais c’est un as de la stratégie. D’abord il flingue tous les Césaricides en s’alliant à Marc Antoine son principal rival. Premiers ennemis éliminés. Ensuite il finit d’exterminer les Pompéïens (notamment le fils de Pompée) qui avaient été épargnés par César. Deuxièmes ennemis éliminés. Et ensuite vient le plat de résistance : ses « collègues » du triumvirat qu’il a monté histoire d’avoir la paix pour battre ces premiers ennemis. Lépide est facile à battre mais Marc Antoine c’est un autre morceau, fin stratège et bon militaire, une sorte d’Auguste en mieux quoi, et baraqué.

"Yo yo yo moi c'est Antonio et voici ma gow" (ceci est une image d'illustration et pas la photo des vrais protagonistes)

Donc Octavien ce petit filou profite d’être à Rome pour monter tout le monde contre Antoine, en montrant combien il est dépravé de s’acoquiner avec une catin égyptienne, de dénoncer le fait qu’Antoine en secret veut se faire roi (c’est peut-être pas vrai, mais les Romains ont horreur des rois, la preuve ils ont buté César sur cette peur-là) ou encore de le vilipender pour son amour de l’Orient et son hellénophilie ; oui à l’époque on est ouvertement racistes et Zemmour en face d’Octavien passerait pour un mec un peu tiédasse et super accueillant 😃. Au-delà de ça il renforce son pouvoir par les batailles qu’il remporte (enfin pas lui, mais ses copains plus talentueux dans le domaine militaire, on peut pas être partout hein), sa filiation avec César qui est divinisé par ses soins (« divi filius » sur un CV ça en jette pas mal). Bref, la confrontation étant inévitable, la bataille décisive a lieu à Actium en 31 av. J.-C. et c’est une bataille navale. Vous l’avez deviné, Antoine et Cléo se prennent des « touché-coulé » en masse et se retirent comme des lâches à Alexandrie pour finalement se suicider. Ah les cons.


Et du coup, qui est seul au pouvoir ? C’est notre Octave-Octavien-futur Auguste. Mais malin qu’il est il ne va pas répéter les erreurs de son tonton-papa ! Donc il rétablit dans les formes la République mais peu à peu se fait accorder tous les pouvoirs par le Sénat. Quand on choisit soi-même les sénateurs, c’est vrai que c’est plus facile. Grand pontife, Imperator (au départ ça veut juste dire qu’il a remporté des victoires militaires), Caesar divi filius (il fait de Caesar un nom dynastique), Princeps pour éviter de dire « roi » et seulement « le premier des citoyens », rien que ça ; et… Augustus ! Ce titre qui sera utilisé comme un nom propre veut en fait dire « le plus illustre ». Ah le mec avait le boulard, je vous dis pas. Mais en gros, il réussit à fonder un régime purement monarchique (enfin je schématise, les puristes hurleraient) en n’acceptant les titres et pouvoir qu’à « contre-coeur » et à le stabiliser en sécurisant les frontières, les institutions, l’économie, etc. C’est donc l’homme providentiel qui est tellement bon qu’il peut imposer aux Romains un roi sans que ceux-ci trouvent à y redire, puisqu’il met fin à un siècle de troubles et « laisse une Rome de marbre » en l’ayant trouvé de briques, entre autres choses. Bref oui, Auguste c’est une sorte de… Palpatine 😃 (ou alors Lucas a lu en diagonale un bouquin d'histoire romaine allez savoir...)

En un peu moins moche il est vrai


Bon il faut tout de même en finir ! Le problème avec Auguste c’est que son régime nécessite un successeur et qu’il manque de bol. Au début il choisit pour successeur Agrippa, un pote à lui. Mais bon, il meurt. Ensuite il choisit les deux fils d’Agrippa, Lucius et Caius Caesar. Mais non, ils meurent aussi, non mais ça commence à faire ! Alors qu’il ne voulait absolument pas le choisir, Auguste est obligé d’adopter Tibère, qui est de triste mémoire. Au final, chance ou pas, Auguste aura eu tout de même du nez malgré lui puisque Tibère était un très bon empereur ; après oui il était un peu parano et sur la fin il est un peu parti en live, mais on peut comprendre qu’après s’être senti autant rejeté on tourne mal 😃.


Bon, j’ai été un peu long cette fois et désolé pour ceux qui dorment déjà, mais c’est vrai que la dimension du personnage l’impose. Et encore, j’ai dû trier, j’aurais pu en écrire des bouquins. Il est vrai que le personnage prête moins à rire que les anecdotes habituelles, donc je vais vous en donner une ou deux marrantes (ou pas).
• Auguste a envoyé un général, Varus, mettre la pâtée aux Germains, mais c’est finalement lui qui a perdu ses légions dans l’affaires. D’où une phrase célèbre d’Auguste : « Varus, legiones redde » ou « Varus, rends-moi mes légions ». Hé bah non, une de perdue, une de perdue !
• Virgile avait été mandaté pour faire une histoire de Rome à caractère épique et mythologique, via l’Enéide (« arma virumque cano », oui le truc au lycée que tous les latinistes connaissent…). Un truc classe avec le portrait en creux d’Octave. Mais n’étant pas content du résultat il aurait voulu la brûler juste avant de mourir ; heureusement, Auguste a eu le bonne idée de sauver l’ouvrage juste à temps. Ouf, bien joué le mégalo !
• Pas le roi du rire mais assez habile en formule, juste avant de mourir Auguste aurait eu cette formule : « Acta est fabula » (oui le titre hihihi). « La pièce est jouée ». Mais en fait, il n’a jamais prononcé cette phrase, ce sont ces sacripants d’historiens romains qui ont peu à peu embelli la mort de l’Empereur.
• Et enfin je ne résiste pas au plaisir de vous donner sa titulature finale, qui est quand-même chiadée, d’autant qu’il est le créateur du « modèle » pour un bon moment : IMPERATOR CAESAR DIVI FILIVS AVGVSTVS, PONTIFEX MAXIMVS, TRIBVNICIAE POTESTATE XXXVII, IMPERATOR XXI, CONSVL XIII, PATER PATRIAE. Rien que ça !

Allez, sur cette lecture,
Ave !