Quel pouvoir reste-t-il vraiment au président eFrançais ?

Day 5,346, 03:05 Published in France France by Dhelk


Contexte géopolitique binaire, système économique dysfonctionnel, population impliquée en baisse, prépondérance du militaire, disparition du RP politique : quelle marge de manœuvre reste-t-il vraiment au président français pour gouverner le pays ? L’élection présidentielle revêt-elle encore une quelconque importance ? Un programme politique autre que la gestion des affaires courantes est-il possible ? Autant de questions que mon retour dans l’eMonde a fait naître et auxquelles il me semble important, non pas d’y répondre, mais d’en prendre la pleine mesure. Car le siège qui était jadis la place la plus enviée du pays, semble être devenue le fardeau mensuel d’une nation sans boussole.


I - Un contexte géopolitique sans nuance

Sur le papier, eRepublik fait la part belle au jeu des nations. Avec une lutte pour la domination mondiale en toile de fond, il a toujours été question d’alliances, d’amitiés et d’inimitiés, de représailles, de plans de bataille savamment étudiés ou de décisions militaires irrationnelles, parfois en miroir des luttes du vrai monde, pour la satisfaction d’un RP ou tout simplement pour le plaisir de se rassembler momentanément.

À une époque où les alliances n’étaient pas inscrites comme une mécanique à part entière d’eRepublik, les relations bilatérales entre nations étaient plus riches et complexifiaient les prises de position internationales. Cela ne signifie pas que des grandes alliances n’existaient pas - bien au contraire (on se souvient par exemple de Phœnix ou Eden) - mais la multiplicité des points de contacts entre nations favorisait une stratégie géopolitique permettant de s’affranchir des œillères d’une lecture dichotomique de la carte de l’eMonde.

J’ai quitté eRepublik quelques mois après la fin de mon mandat présidentiel de décembre 2019, dans un contexte où l’eFrance - suite à sa décision référendaire - devait trouver une voie dans laquelle faire vivre une neutralité de fait. L’eFrance d’alors était déjà extrêmement polarisée entre le camp pro-CODE et le camp de ceux qui nourrissaient la nostalgie d’HYDRA - alliance proche d’Asteria, dont l’eFrance a été membre fondatrice. J’ai alors consacré la grande majorité de mon mandat à nouer ou renouer des liens bilatéraux en dehors du jeu de la polarisation du conflit CODE/Asteria, à ouvrir la discussion tant avec nos amis que nos ennemis, et surtout avec notre Congrès. Car la posture de la neutralité, malgré les défauts qu’elle présentait, avait ceci de bien qu’elle permettait à une nation divisée, plongée dans un climat délétère de suspicion et de duplicité, de dialoguer et de pratiquer ce qu’elle avait longtemps délaissé : le compromis.

En juin 2020, soit six mois après mon mandat, la France a finalement rejoint l’alliance CODE. Depuis, les mandats présidentiels se sont succédés, avec un fil rouge : une étonnante uniformité des candidats, qu’elle soit dans leur provenance politique, de leur profil de citoyens ou de leur volonté d’appliquer une politique semblable.

Bien entendu, l’adhésion à une alliance tend à uniformiser la politique extérieure, à la rendre conforme aux pré-requis déterminés par l’alliance. Le statut de nouvel arrivant parmi une communauté de nations désireuses de protéger ce qu’elles ont construit ensemble, impose d’autant plus une certaine diligence vis-à-vis de l’alliance, à ne pas faire de vagues pour gagner la confiance des pays-membres.

Est-ce une position enviable ? Non pas d’appartenir à une alliance, mais d’être contraint de souscrire à une vision bipolaire d’un eMonde à deux blocs, sans autre alternative que celle de mener la guerre à l’autre moitié du globe. Surtout, est-ce enviable d’accepter que - quelle que soit la richesse des propositions d’un candidat à la présidentielle - il devra accepter, une fois au pouvoir, qu’il mènera une diplomatie déterminée au quartier général de l’alliance, et non par l’expression du vote des citoyens ?


II - L’omniprésence des tanks dans l’appareil d’État

Pour cette section, je me permets en amont de préciser qu’il ne s’agit pas d’une partie à charge, mais bien d’un constat. Pas nouveau, qui plus est.

La nature militaire d’eRepublik amène invariablement à une connivence entre les postes politiques et les citoyens militairement très impliqués. À l’époque où les unités militaires n’existaient pas encore, l’armée eFrançaise occupait une place centrale dans la vie de l’État. Entre 2010 et 2012 déjà, son poids dans le choix des candidats à la présidentielle avait notamment été longuement débattu. Surtout, à mesure qu’elle se structurait indépendamment, l’armée développait une volonté naturelle d’influence de la politique de l’eFrance, afin de satisfaire ses soldats, permettre le progrès statistique de ses troupes et s’offrir quelques moments mémorables.

Si à l’époque les carrières politiques pouvaient se faire sans nécessairement briller sur le champ de bataille, on constate désormais que les tanks sont omniprésents dans l’appareil d’État. Et c’est là une question épineuse.

Par définition, les tanks sont des citoyens dont la régularité et l’investissement personnel (en temps, et en argent) sont supérieurs au reste de la communauté. Leurs statistiques militaires dépassent de très loin le reste de la population, rendant leur contribution incontournable à la survie du pays. Dans un contexte où la population française était dix fois plus importante qu’actuellement, et que les écarts militaires n’étaient pas aussi creusés, l’adhésion des tanks ou de l’armée à un projet politique n’était pas obligatoire pour le voir triompher. Désormais, nous sommes dans une ère d’oligarchie politique et militaire qui fait et défait des gouvernements.

Leur concours est nécessaire pour l’emporter. Plus encore pour mener un mandat à son terme. Un président en exercice ne peut se soustraire à leur contentement. Et la configuration est idéale si le chef de l’État est issu de leurs rangs.

Pour autant, il serait malvenu de leur reprocher leur investissement et, par extension, leur volonté d’avoir un droit de regard sur la politique de la nation. Ces citoyens extra-ordinaires (au sens littéral du terme), garantissent que nos couleurs puissent demeurer sur la carte de l’eMonde. Et la nation doit leur en être reconnaissante.

Laisser le champ libre à une privatisation de l’eFrance par ces citoyens d’élite, sans contrepoids ni alternative, est-elle pour autant la meilleure des options ?


III - Les difficultés d’une politique intérieure remarquable

Parmi les nombreuses mécaniques dysfonctionnelles d’eRepublik, le module économique occupe une place particulière. Au fil des années, beaucoup d'initiatives ont été entreprises afin de corriger le tir et permettre un meilleur équilibrage du système, sans autre succès que de le maintenir à flot.

Mis à part la location de ressources, la vente de dégâts, un trifouillage sporadique des taxes et une pratique assidue du spread, les scénarios de politiques économiques sont limités. Un phénomène accentué par la quasi-disparition du Role Play politique. Je parle ici du véritable, pas les formules éculées distribuées mécaniquement en commentaires d’articles. Il est question ici du Role Play qui dictait les propositions des formations politiques, jusque dans leurs programmes électoraux et leurs prises de position au Congrès. Une pratique perdue depuis que la démographie a lourdement chuté et que la rationalité d’un investissement personnel des citoyens, de plus en plus monnayé, s’est imposée comme unique ligne de conduite politique possible.

Sur les autres volets, comme la démographie, les forces vives manquent pour établir un programme de long terme, réfléchi et extrêmement chronophage.
Le même problème est à déplorer du côté de l’animation communautaire. Les plus anciens se rappelleront du MinLulz, une cellule destinée à distraire les citoyens et en renforcer les liens à travers des blagues centrées sur la vie communautaire, ainsi que des concours, loteries et autres initiatives collectives.

Avec tous ces écueils, soit inhérents à eRepublik soit aux au délitement de la communauté, l’élection présidentielle présente-t-elle encore le moindre intérêt ? Le président est-il toujours le moteur de la nation ?

À titre personnel, j’aime à penser que oui. Mais seul, il ne peut porter ce fardeau indéfiniment. Surtout, notre communauté doit comprendre que son seul salut ne se trouvera que dans une volonté partagée de renouveau et de pardon.

Allons-nous nous donner cette chance ?