Come Back From The Dead II

Day 4,222, 04:51 Published in France France by Dhelk


Au bout de mes doigts, des picotements.

Je sens les nerfs de mes paupières s’activer, la peau fine tressaillant par intermittence. Un flux, furtif, parcourt mes jambes lourdes. Soudain, j’ouvre les yeux, expirant avec force. Je roule sur le côté, tâtonnant le pourtour de ma bouche afin d’en retirer des poils de barbe englués dans le filet poisseux expiré par mes poumons. La toux se calme enfin. Je me redresse doucement : assis, pathétique, chamboulé ; je reconnais le décor familier de mon salon. Les murs sont décrépis, le plafond s’émiette.



« Deux renaissances en deux ans, je crois que j’ai assez donné », me dis-je. Cette fois pourtant, on n’avait pas pris la peine de m’enterrer. J’étais resté là, gisant au milieu de mon salon. Plongé en pleine discussion avec moi-même, je me promets que ce serait la dernière.

Prenant appui sur l’accoudoir du canapé, je me relève laborieusement. Mes jambes sont raides, mon dos plus rouillé encore que les barreaux aux fenêtres. J’entends que l’on s’agite dehors. La tringle à rideaux cède quand j’essaie de les écarter, inondant la pièce d’une intense lumière blanche. Les yeux plissés, je parviens à distinguer le mouvement furtif d’une cohorte de miliciens arborant le drapeau français au sommet de leurs casques. L’arme au poing, ils poursuivent un régiment hongrois battant en retraite, les abondant de rafales amenuisant le nombre d’ennemis tous les dix mètres. Un bip strident retentit dans mon dos, de l’autre côté de la pièce. Sur l’écran poussiéreux de mon ordinateur, une notification s’affiche.


« Salut. Ton implant de surveillance nous indique que t’es réveillé, mon vieux. Bon retour parmi nous ! La résistance s’organise, voilà l’adresse du QG, si t’es pas trop rouillé.

Bla, président de l’eFrance »



Un sourire se dessine sur mon visage flétri. Je sens l’énergie revenir par vagues.

Un choc contre un carreau m’interpelle : un petit drone de transport stationne devant la fenêtre, maintenant son équilibre tant bien que mal alors qu’un paquet volumineux le tire vers le sol. Je traverse l’appartement à grandes enjambées, détache le paquet du drone qui repart presque instantanément, englouti par la brume.

Je pose les yeux sur le paquet : un coffret en bois brun, scellé par une serrure dorée. Un petit mécanisme permet de le déverrouiller, je l’actionne. La serrure émet un petit « clic » avant de laisser apparaitre son contenu : mon vieux chapeau en feutre, une canne rétractable flambant neuve dont le pommeau représente un petit chien bedonnant en or, ainsi qu’une fiole remplie d’un liquide noir. Un mot calligraphié repose au fond du coffre :


« L’une des dernières fioles de la Cuvée Millésime Droopy 2009. Elle a survécu aux bombardements hongrois. Bon retour, l’ami. »


Reposant délicatement la fiole, je me saisis de la canne, admirant son pommeau étincelant.

Il est temps.