La comète bleue

Day 4,048, 01:35 Published in France Brazil by Guanaraba


La comète bleue

L’ampoule clignotait, projetant une pâle lueur blanche vacillante sur les murs gris défraichis. Partout des infirmiers, des médecins s’activaient, couraient dans tous les sens. Partout ces mêmes mines inquiètes, ces mêmes regards apeurés.

Assis par terre, entassée avec cinquante autres personnes dans un couloir lugubre, Sarah regardait la plaie béante sur le côté droit de son ventre. L’hémorragie s’était calmée mais elle avait perdu beaucoup de sang. Le stress et l’angoisse avait laissé place à l’épuisement et le fatalisme. Tout autour d’elle, les autres patients étaient dans le même état, sinon pires. Ses cheveux bruns jadis lissent et soyeux étaient maintenant emmêlés et couvert de saletés, ses yeux étaient rougis par l’insomnie et la tristesse, ses vêtements encore propres ce matin étaient maintenant tâchés de sang…

« C’est peut être ça ma fin » pensa-t-elle. « Je vais peut-être mourir ce soir dans ce couloir, moi ou peut-être ce vieil homme là-bas, affalé contre le mur, le regard vide de vie et le visage taché de gouttelettes de sang. Ou encore cet enfant pleurant dans les bras de sa mère... Peut-être que c’est la fin pour nous tous. » Cette pensée la soulageait quelque part. « Tout sera bientôt fini, les souffrances disparaitront, l’angoisse, la peur… Tout va se terminer… ».

Elle se leva de manière machinale, sans presque s'en rendre compte malgré la douleur causée par sa blessure.
Une grand-mère lui agrippa la manche dans air apeuré. « Où vas-tu ? Tu vas perdre ta place, reste ici mon enfant, c’est dangereux dehors.».

Sarah regarda la vieille dame. Celle-ci tremblait de peur, ses yeux étaient brillant de larmes… « Je devrais restée près d’elle » pensa-t-elle, « ma présence la rassurerai sûrement… Mais j’ai besoin de prendre l’air».

« Je sors juste un instant, je reviens très vite, ne vous inquiétez pas…Je sors et je reviens, promis ». Dit-elle tout en s’éloignant à dans le couloir en direction de la sortie.

Autant l’atmosphère dans le bâtiment était viciée, moite, bruyante et stressante, autant l’extérieur étaient silencieux et sombre…

Sarah respirait à plein poumons. L’air de la nuit était frais, apaisant. Pas un chat dans la rue, pas un son ni un mouvement. Seules les silhouettes figées des bâtiments en ruines se détachaient dans un ciel sans nuages et chargé d’étoiles.

« Ça fait du bien d’être dehors pas vrai ? »

Sarah sursauta, elle n’avait pas vu la sentinelle adossée près de la porte d’entrée de l’hôpital, cigarette entre les lèvres.

« - Oui… J’avais besoin de prendre l’air, j’allais devenir folle là-dedans

- Je comprends. De toute façon, ici ou à l’intérieur, on est foutu, alors quelle différence… cigarette ? » Se faisant il tendit le paquet

Elle en saisit une puis s’assit près du soldat. Tout deux regardaient les étoiles, scintillantes comme des milliers de petites perles dans un ciel d’une noirceur totale.

Soudainement, une détonation se fit entendre au loin, faisant trembler le sol. Un point bleuté laissant une légère trainée apparu dans le ciel. Se confondant avec les astres, il paraissait presque comme une étoile filante.

Le soldat se tourna vers Sarah, les yeux pleins de larmes mais esquissant un sourire…« C’est le moment de faire un vœu… »

La jeune femme plongea son regard dans le sien. Des grosses larmes coulèrent sur sa joue, son cœur rata un battement, puis un autre. D’un noir d’encre il y a encore quelques secondes, la nuit était maintenant éclairée de plus en plus par la lumière bleutée du missile se rapprochant. Collant son visage contre l’oreille du jeune homme, elle murmura « J’aurais finalement aimé ne pas mourir maintenant ».