Le récidiviste, voilà l’ennemi !

Day 2,623, 10:15 Published in France North Macedonia by AZAZEL GRIGORI

« Un bon délinquant, un homme qui a commis une série de petits vols, de petites escroqueries, de petits attentats aux mœurs (...), quoiqu’il n’ait peut-être encore assassiné personne ni volé sur les grands chemins, un récidiviste en un mot, mérite un traitement privilégié de la part des tribunaux correctionnels. On le punit alors, non à cause de ses délits passés, remarquons-le, mais bien en raison des délits futurs qu’il commettrait si on ne le punissait pas . » Cette citation de Gabriel Tarde, l’un des fondateurs de la criminologie, date de 1890. Elle aurait aisément pu se glisser dans les débats parlementaires concernant la loi relative à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines adoptée par le Parlement le 17 juillet 2014. Elle résume en effet une préoccupation constante de ceux qui s’intéressent à la pénalité : comment éviter la récidive ?

Dans le sillage des politiques de loi et d’ordre (law and order politics) promues depuis le début des années 1980 aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, on a misé un peu partout en Europe sur le caractère dissuasif de la sanction. L’alourdissement des peines et l’automaticité des condamnations en cas de récidive constitueraient les meilleurs remparts contre le crime. Les délinquants s’abstiendraient de passer à l’acte, le prix à payer (l’emprisonnement, notamment) surpassant le bénéfice escompté. En France, les peines planchers instaurées par la loi du 10 août 2007 reflètent cette philosophie du choix rationnel : elles fixent des seuils minimaux de condamnation que les magistrats sont, pour l’essentiel, tenus de respecter. Particulièrement adaptées à la démagogie punitive de certains gouvernants (et à leurs discours de combat contre la drogue, les « racailles » et le désordre), ces mesures n’ont pourtant guère fait leurs preuves. Elles ont rempli les prisons jusqu’à provoquer des records historiques du nombre d’incarcérations (soixante-sept mille huit cent vingt personnes détenues en France au 1er février 2014), sans que les maux qu’elles étaient censées combattre ne montrent de signes de déclin.

La loi proposée par la garde des sceaux Christiane Taubira indique une autre voie. Prenant au sérieux l’expérience des professionnels du monde socio-judiciaire, de même que les acquis de recherches sur les trajectoires pénales , elle considère l’individualisation des peines — c’est-à-dire la prise en compte des multiples aspects de l’existence des condamnés — comme le meilleur moyen de favoriser leur éloignement de la délinquance. La loi supprime ainsi les peines planchers. Elle crée une « contrainte pénale » permettant aux magistrats d’éviter certaines incarcérations au profit d’un contrôle extérieur fait d’obligations (de réparation, de soins, de formation), d’interdictions (de conduire, de fréquenter une victime ou certains lieux) et de programmes individuels ou collectifs de prévention. Elle entend également renforcer la prise en charge des sortants de prison, une population très vulnérable à la récidive. « Signal d’une capitulation en rase campagne de l’Etat », « sacrifice des Français et de leur sécurité sur l’autel du laxisme », « message d’impunité », « optimisme naïf et loin des réalités » : les protestations véhémentes de nombre de députés montrent que le texte marque un clair changement de perspective. Il ramène le balancier pénal vers des parages moins idéologiques et sans doute plus pragmatiques.


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