Contes et légendes de Lorraine : le sotré

Day 2,627, 10:01 Published in France Ireland by Cry of Banshee

Bonjour à toutes et tous,

ci joint pour annoncer mon retour en eFrance, une nouvelle anciennement écrite sur un de mes personnages favoris des Vosges et de lorraine (peut etre par ce que j'en ai aperçu lors de ma tendre enfance a Valleroy aux saules..tout un programme) dsl pour le pavé mais j'ai fait un résumé lol, enjoy 😁



Comme jadis les dieux lares, protecteurs du foyer domestique. Au moyen âge, la scandinavie enfenta les trolls et les elfes, l'Allemagne les kobold, la Bretagne les korrigans, dont les exploits ravissaient d'aise ou frappaient de terreur grands et petits. Tous ces êtres mystérieux, proches parents les uns des autres, avaient en commun leur petitesse et leur nature aérienne et légère de lutins fantasques et malicieux.

En Lorraine, le génie familier des vieilles demeures s'appelait le Sotré.



C'était un être minuscule, habillé de rouge, coiffé d'un chapeau de même couleur, chaussé de menues sandales de cuir. Il se manifestait très rarement, mais sa présence se devinait à certains signes insolites : services rendus ou mystifications.

Le Sotré opérait de préférence la nuit, demeurant le jour caché au fond des puits, sur le bord des étangs ou des rivières, et même dans le clocher des églises.

Le Sotré était un ami du foyer, qu'il protégeait. Il en aimait tous les habitants et sa sollicitude pour eux allait jusqu'a les aider discrétement dans leur travail.

En effet il n'était pas rare d'entendre, la nuit, craquer un meuble ou grincer le plancher. Les habitants de la maison étaient alors persuadés que ce craquement était provoqué par le Sotré qui faisait sa ronde pour se rendre compte si tout était bien en ordre, en particulier s'il n'y avait pas de risque d'incendie.

Lorsque l'enfant dans son berceau pleurait, puis soudain se rendormait, c'était le Sotré qui venait le bercer et lui glisser discrétement a l'oreille une chanson douce. Et quand a son réveil, la mère de famille trouvait son nouveau né, les cheveux emmêles et collés au front, c'était la preuve que le Sotré avait veillé toute la nuit sur son sommeil.

" ç'ost lo Sotré qui li é tossé les chovoux" disait -elle alors (c'est le sotré qui lui a emmélé les cheveux)



Mais le Sotré affectionnait avant tout la compagnie des animaux, et se plaisait beaucoup dans les étables.

- C'était lui qui peignait la crinière de ses cheveaux préférés, c'était lui qui refaisait leur litière.

- si le valet de ferme avait oublié de leur disposer de la paille fraîche. C'était encore lui qui veillait sur le jeune veau, guidant son museau vers le pis de la vache.

- Au poulailler il écartait les belettes et les renards, s'assurant toujours que la chatire etait bien fermée.

Quand le fermier apportait le trèfle ou la luzerne aux lapins, c'était le Sotré encore qui retirait aussitôt la mauvaise herbe, cigüe, mouron rouge.

Et pour tout salaire, il ne réclamait qu'un peu de lait ou du fromage frais.


Le Sotré avait en outre la réputation d'être un expert en mycologie. Aussi, lorsqu'on revenait de la cueuillette aux champignons, était il prudent de laisser le panier dans la grange, pour laisser le Sotré faire son tri : le matin, on retrouvait sur le fumier les espèces douteuses ou vénéneuses. Les champignons qui restaient dans le panier pouvaient etre consommés sans la moindre crainte 🙂



Toutefois le Sotré, comme tout lutin qui se respecte, avait un caractere malicieux, pétulent et taquin.

Pour s'amuser, il lui arrivait souvent de jouer des farces aux habitants de la ferme. C'était d'ailleurs son seul délassement et d'ordinaire, on lui pardonnait volontiers ce coté chenapan et ses écarts de conduite. Il prenait un malin plaisir a embrouiller l'écheveau de laine de la fileuse, il dérangeait le rouet, il égarait malicieusement les objets ou les déplaçait. A l'étable il lui arrivait quelquefois de détacher les animaux ou de les attacher par la queue 😉

Par une singulière disposition d'humeur, le Sotré craignait la couleur rouge, qui était pourtant celle de ses vetements. Pour l'éloigner il suffisait de suspendre un chiffon rouge aux endroits qu'il fréquentait et a l'écurie, une branche de houx produisait le meme effet.

Et, si en général le Sotré n'était pas méchant, il pouvait se mettre dans de terribles colères! Malheur a celui qui se moquait de sa petite taille ou cherchait a s'emparer de son chapeau!

On raconte qu'a chaque fois qu'un Sotré se manifestait aux gens c'était toujours pour demander :

"Mé chépiron m'sié-t-i bié?" (mon chapeau me va til bien?)

Si on le trouvait élégant, il manifestait une grande joie.

Mais si on le raillait il entrait dans une épouvantable fureur en ralant de sa petite voix aigue et en tapant du poing sur le sol. Et la valait il mieux se retenir de rire devant ce spectacle 😁

Hélas aujourd'hui, on en trouve plus le sotré dans les foyers Lorrains, et déja au siècle dernier on regrettait sa disparition...

" Hélas! ta place est vide, esprit de ma Lorraine
Ou est tu, Sotré, ô lutin familier,
Toi qu'on voyait jadis pendant la nuit sereine
Scintiller à travers les branches du hallier "