Edition n°4 : L'Odyssée d'un Androïde (1)

Day 2,518, 02:09 Published in France Belgium by Infiniti1606

Bonsoir à toutes et à tous,



Pour ne pas changer, pas de proposition de texte donc je continue, tant bien que mal, à ressortir des vieux textes à moi et à les ré-écrires pour ne pas non plus vous exposer trop ostensiblement mes erreurs de jeunesse en matière de jeu de rôle.

En cadeau pour les rares lecteurs ayant suivis les premières éditions et lus les premiers extraits que j'ai fait du Lekrë Saeji, malgré la différence de ton et de contexte, cette histoire se déroule bien dans le même univers que les histoires contées par Kirill Saeji... Nous revenons juste quelques siècles en arrière, avant même l'avènement du "Second Empire Golem".


Bonne lecture !


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Téléchargement : Ok

Décodage : Ok

Affichage : Ok




Que faisiez vous dans cette partie de la matrice ? Que cherchiez vous dans le flux des données à transfert rapide ? La réponse n'a que peu d'importance puisque la résultat escompté n'est pas la. Un amas de données ramassées les unes sur les autres, beaucoup semblent clairement corrompues, effet indésirable du transfert rapide, cependant, au milieu de tout cela, un pack de données compressées semble se trouver potable.

Le terminal public sur lequel vous vous trouvez ne ferrait qu'une bouchée de ces informations. Sur la matrice, les I.A. veillent, quel risque auriez vous à vérifier le contenu de ces données ? Nul n'est encore jamais passé au travers de leurs filets, alors, qu'attendez vous pour aller vérifier ce pack ? Votre curiosité n'est-elle pas en train de vous titiller ?

Mais alors, plongé dans cette réflexion tout à fait normale, votre terminal se met à réagir tout seul sans attendre vos instructions. Quel est son utilité à télécharger le pack de données ? A les décompresser ? Êtes vous finalement sûr que le terminal ait fait cela tout seul, ou êtes vous simplement incapable de maîtriser votre désir de connaissance ?

Lentement, le pack se débloque et libère un fichier inconnu qui se charge sans attendre. Peu volumineux, peu complexe, le transfert rapide ne s'embête pas des détails. Lorsque, au terme de quelques secondes d'attente, le fichier est finalement téléchargé, une fenêtre de vidéo d'un noir d'encre s'ouvre et se lance, et cette fois-ci, elle le fait pertinemment sans votre instruction préalable.


« Moi, je te dit que les chances que cette caméra vidéo numérique marche à nouveau est de une sur... »

Soudainement, sur ce qui n'était qu'un écran noir ne faisant que refléter votre propre visage, une image apparaît. Trop claire pour l'instant, braquée directement en direction d'un pâle soleil matinal, votre seule source d'information reste cette voix robotique reprenant la parole :

« Tu marques un point petit. Ne souris pas ainsi, cela n'en fait qu'un.

Le silence revint alors, ne se brisant que lorsque le vent sifflant fit voleter un peu de sable, l'image daigna alors se diriger vers autre chose que ce soleil éblouissant. Peu à peu, la luminosité diminua jusqu'à ce que quoi que ce soit devienne enfin visible.

- En attendant, heureusement que j'ai plus l'œil que toi, Ji, c'est toi qui m'avait parlé de la diffusion d'infos, c'est grâce à cela que nous la feront. Ait confiance, je vis dans ce genre de merde depuis une dizaine d'années. »

Alors que ces paroles retentissent juste derrière l'hypothétique caméra retranscrivant la scène, la lumière se fit assez faible pour que l'on puisse voir ce qui est ciblé. Une titanesque cité semble se trouver à l'horizon, une cité d'où semble s'échapper toujours plus de fumée à chaque seconde, et au moins autant de silhouette à travers les grandes portes ouvertes de la ville, la civilisation s'apprête à fuir l'un des grands bastions de l'Empire et ses promesses sans fondements.

« Ji... C'est quoi tout ce monde la bas ?

Le silence retomba, lourd, on pouvait encore entendre des explosions venant de la mégapole malgré la distance importante les séparant. Des pas bruyant se firent entendre avant qu'une imposante silhouette paraisse à l'écran, tourné vers la ville. Un long moment s'écoula durant lequel quelques bourrasques de vent balayèrent la zone, soulevant un peu de sable à chaque souffle, lorsque enfin, le pseudo-replicant parla :

- Ce sont ceux qui quittent cette cité devenue invivable. Il semblerait que devoir affronter la rudesse du monde extérieur ne commence plus à effrayer grand monde. On ne doit pas traîner petit. »

Se retournant face à la caméra, une vision que certains qualifieraient d'horrible se montra au spectateur, l'androïde moulinait du bras gauche dans une direction opposée à la caméra alors que son avant bras droit semblait absent, sa combinaison étant toute tachée de liquide noirâtre à partir du coude et un garrot avait été visiblement fait pour limiter la perte de ce fluide. Entre autre, il se trouve être masqué pas un étrange dispositif de filtrage d'air malgré le fait que cela ne soit pas perceptible dans sa voix.

« Bien, il faut qu'on parte vers le Sud, le spatioport est à plusieurs centaines de kilomètres, j'espère qu'on y arrivera avec cette poubelle. Faire fonctionner ce que tu tiens est une chose, remettre en fonction ce genre de technologie là, c'est une autre paire de manche. »

Quittant à nouveau le champs, la caméra resta un instant braquée sur la ville qui ne semblait pas vouloir paraître plus accueillante, puis, doucement, l'image se mit à remuer au rythme des pas du porteur de celle-ci, faisant retentir chaque pas dans les gravats de la "route" alors que l'image se rapprochait, elle, d'un tas de ferraille très imposant émettant d'étranges bruit. Quelques secondes plus tard, le désagréable boucan s'harmonisa et, contre toute attente, prouva qu'un vieux transporteur de marchandises put encore sortir de la déchetterie de la ville pour rouler à nouveau.

Lorsque l'image se trouva plus fixe, la voix désincarnée de la machine sur pattes se fit entendre au devant du gros tas de rouille :


« Allez, entre dans la cabine ! J'ai encore une ou deux bricoles à faire sur le réacteur, sinon on finira le voyage à pied. Et à pied, on ne vivra pas plus longtemps qu'un glaçon sous le soleil. »

La caméra avança encore un peu jusqu'à une porte rafistolée, puis la elle s'abaissa vers le sol, visant une paire de chaussures trouées et recousues en de nombreux endroits alors qu'un bruit de ferraille rouillée grinçait dans les oreilles du spectateur. S'en suivit un violent mouvement de l'image, la caméra volant littéralement durant une demi-seconde pour se retrouver sur une banquette véritablement moisie, l'image visant l'ouverture faites grâce à la portière ouverte.

Deux mains se levèrent et se posèrent sur le rebord de l'ouverture, plusieurs petites exclamations suivies de soupires suivirent, et ce pendant un long instant, lorsque finalement, le buste du cyborg fit son apparition. Ainsi placé dans l'encadrement, sa tenue épaisse et sale autant que son affreux masque étaient alors pleinement visibles :


« Allez, faut pas traîner petit ! »

Accompagnant le geste par la parole, de son seul bras gauche, il attrapa quelque chose entre les deux mains et souleva un petit être par le col, un jeune humain ne devant pas dépasser les douze ans à la vue de son visage et de son corps juvénile retomber juste à côté de la caméra en faisant couiner la banquette rongée par la vermine.

Sans attendre, la porte claqua derrière lui et des bruits de pas rapides autour de la cabine se firent entendre alors que la caméra revenait dans les mains du jeune humain afin de viser l'autre portière. Cette dernière s'ouvrit immédiatement afin de laisser pénétrer le robot qui jeta un petit coup d'œil dehors, en arrière, comme un peu paniqué.


« Qui l'eut cru, certains ont même emportés des armes au dehors. On sous-estime ces gens toute sa vie et c'est au moment ou ils deviennent un danger mortel qu'ils vous surprennent. »

Sans attendre plus longtemps, le masqué claqua la portière, se démenant ensuite avec habilité pour démarrer le véhicule sans son bras droit. Pendant ce temps, des cris se firent entendre, des coups de feux également, mais bien trop lointain pour inquiéter le petit duo qui finit par s'éloigner de la zone aux commandes de la poubelle flottante, ou tout du moins, à se déplacer à allure constante dans une direction indéfinie.

Ainsi visé par la caméra, le conducteur semblait concentré sur la "route" qu'il suivait. Mis à part les raclements de la carrosserie dans le sable et les bruits inquiétants troublant l'harmonie du réacteur, rien ne troublait le silence jusqu'à ce que cette voix, qui ne ressemblait en rien au jeune humain, se remette à parler derrière la caméra :


« Alors Ji, maintenant qu'on à de quoi transmettre et qu'on à écarter le plus gros danger, vas-tu m'expliquer ?

Rapidement, Ji tourna la tête face à la caméra sans que l'on puisse savoir sur quoi se portait son regard, puis se remis face à la route pour répondre au gamin curieux.

- T'expliquer quoi ? Pourquoi je t'ai empêché de rentrer en ville ? Pourquoi je t'ai demandé de m'aider ? Pourquoi je t'emmène avec moi ? Pourquoi je t'ai demandé de trouver quelque chose dans le genre de cette caméra ? Beaucoup de questions, j'ai le temps d'y répondre, alors vas y petit, donne moi tes priorités.

Visiblement décontenancé du fait de pouvoir obtenir toutes les réponses qu'il désire, l'humain bafouilla un peu avant d'arriver à articuler sa réponse :

- Eh bien... Hem... Oui, m'expliquer pourquoi tu m'as attrapé ainsi alors que je fouillais la décharge. Pourquoi je suis là à m'éloigner de la cité et pourquoi il faut qu'on enregistre ainsi notre voyage ? Accessoirement Ji, je m'appelle Alrick, et je ne suis pas petit, pas pour mon âge en tout cas, vu l'endroit ou je vit.

- Okay okay, Alrick ! Je pense que tu sais pertinemment qu'elles sont les deux premières réponses, si je t'ai attrapé et emmené, c'est par ce que tu te serais fait tuer dès ton entrée en ville, quant au fait de t'emmener avec moi... Je n'ai pas l'habitude de laisser tomber des gens qui me rendent service, ni de me tromper dans mes calculs, avec un seul bras, en solitaire, mes chances d'arriver à mon objectif étaient quasi nulles.

D'accord, à ce sujet, voudrais tu bien m'expliquer, à moi comme à ceux qui regarderont cela, pourquoi n'as tu qu'un bras ?


En posant cette question, l'androïde lâcha le volant de direction un bref instant afin de s'assurer que le garrot ne se desserrait pas. Au passage, cela lui permettait de ménager un léger suspens tout en mettant en avant le fait qu'il s'agissait là d'une blessure grave, même pour une machine.

- La folie petit... La folie. Il fallait que je quitte le centre de restructuration physique avant mon rétablissement total afin de pouvoir m'enfuir plus facilement, enfin, plus facilement, on s'est compris. Malheureusement, un androïde sortant de la chaîne de restructuration, cela ne manque pas d'attirer l'attention. Nous ferrons bientôt une halte afin de nous occuper. »

L'ersatz de replicant ayant cessé de parler, il n'y eut pas d'autres de réponse, l'image redescendit lentement alors qu'on posait la caméra sur la banquette. Rapidement, l'on pu voir une paire de jambe passer dans le champs pour passer dans le fond de la cabine. Malgré son entrain, le bras droit raccourcis cogna doucement contre son épaule afin de le stopper.

« Pas maintenant, il nous faut du calme et de la stabilité pour effectuer des réparations aussi grave. Reviens ici et reprend la caméra s'il te plait. »

Un petit soupire se fit entendre, puis la paire de jambes passa de nouveau dans le champs avant que la caméra ne soit reprise en main, visant Ji dans son intégralité, loin de ressembler aux vieux camionneurs terrestres.

« Vas y Ji, mais ne traîne pas trop. La batterie ne va pas tarder à nous lâcher, de même que la mémoire, autant faire tout en une fois.

- Bien, bien. Juste le temps d'assurer la route.


D'un mouvement tranquille, le robotique ralentit son véhicule avant de se tourner de moitié vers la caméra afin de s'exprimer directement à elle :

« Ici Jiare Eine, modèle 3773, série 50, je vient de violer l'une de mes obligations d'ex prisonnier de guerre, celle de rester dans l'enceinte d'une cité de l'Empire. Ceci fait de moi un hors-la-loi sur tout le territoire impérial. Entre autre, cette violation étant passible de la peine capitale à mon encontre, il m'est donc impossible de faire marche arrière.

A travers ce message, je ne tiens pas à justifier mes actes, je me suis battu, j'ai été du mauvais côté, j'ai été un héros et un barbare, chacun se fera sa propre idée à mon sujet. Aujourd'hui, la ville est devenue trop peu sure pour que je puisse y résider sans craintes de subir les conséquences de mes anciennes prises de position. Ainsi, je tenais seulement à rassurer tous ceux que j'ai du laisser derrière moi, hélas, je ne suis pas comme vous et vous ne pourrez jamais réellement comprendre ce que j'ai fait comme ce que je fait. »


Sans brusquerie, il accompagna ces paroles d'un léger geste à l'aide de son bras droit, ou plutôt ce qu'il en restait, démontrant là avec quel flegme il prenait l'idée de se désactiver là ou nuls secours ne pourrait récupérer ses restes. Puis il reprit la parole, la voix lente, monotone et méticuleuse dans le choix des mots :

« Cet endroit est devenue trop invivable pour que j'y reste alors que j'ai tant à découvrir en dehors de ses murs. Je suis sur que certains comprendront que ma place n'est pas dans la cité, à vivre cette sempiternelle monotonie qu'est le travail à la chaîne suivis du vol, avec ou sans violence, du fruit de ce travail. Dehors, j'ai un avenir. Il est sans aucun doute encore moins reluisant que la répétition d'une même journée sans intérêt, je l'admets, mais c'est un avenir qui me permettra d'y voir plus clair, de dissiper le brouillard dans lequel je me trouve, de reconquérir ma liberté qui m'a été volé à la fin de la guerre.

A moins de quelques miracles au delà de ma capacité de calcul, ceci est un adieu. Cependant, étant donné que je n'aurais jamais cru revenir la première fois que j'ai quitté cette sombre cité, je me permet un au revoir afin de ne pas décourager ceux qui aiment avoir un espoir. »


Terminant enfin sa petite tirade, l'androïde fit signe à son partenaire de couper l'enregistrement, laissant un très bref instant de silence avant que le caméra ne s'abaisse et que le terminal ne referme la vidéo et se mette en attente d'instruction de la part du spectateur.