Victoria Pyrrhi
Hans.Bauer
Salve !
Pyrrhus, Pyrrhus... Hmm non, ce n'est pas une marque de pneus antiques. Peut-être entendez-vous souvent l'expression employée souvent ces temps-ci "Une victoire à la Pyrrhus" comme dans "Copé/Fillon (ou Niceone/tungo) : une victoire à la Pyrrhus", et j'en passe et des meilleures. Oui mais Pyrrhus, c'est qui et pourquoi n'est-il malheureusement connu que pour cette expression, il faut le dire, galvaudée ? Vous allez le savoir bientôt, vous qui êtes grave impatients.
Premièrement, Pyrrhus, qui est-ce ? Pyrrhus est le roi d'Epire (parfois on ne choisit ni son prénom ni son lieu de naissance et ça donne ça) et contrairement à ce que l'on peut penser il est considéré comme le meilleur général de son temps (calembour nul inside). Pour resituer l'époque d'ailleurs, il naît aux alentours de 318 avant J-C et meurt en 272 avant J-C toujours. C'est le neveu d'Alexandre le Grand, et il profite du désordre créé par la mort de son illustre tonton pour agrandir son propre royaume. Bref, l'Epire c'est en Grèce, et là vous vous demandez "qu'est-ce que ça à voir avec Rome ?" et vous aurez raison d'être si attentifs.
Pyrrhus, faciès doux et avenant
A l'époque, si vous voulez, l'Italie n'est pas qu'italienne. En gros, la Sicile et tout le sud de l'Italie, ça ne ressemble pas aux pays de Don Corleone, avec des gros siciliens mafieux et tout, mais c'est plutôt colonisé par les Grecs. On l'appelle même "Grande Grèce", parce que c'est plus grand que la Grèce et c'est peuplé par des Grecs. On se foule pas pour les noms de région à l'époque. Les cités de cette région, dont principalement Tarente et Syracuse, l'embauchent comme mercenaire pour virer les Romains pour les uns et les Carthaginois pour les autres. La campagne se déroule entre -280 et -275 et c'est elle qui fait sa triste renommée.
Au début pour Pyrrhus, ça roule plutôt pas mal. En 280, il arrive en Italie avec des hommes et des éléphants. A Héraclée, il met d'ailleurs une raclée à des Romains deux fois plus nombreux que ses troupes grâce à ses éléphants. Il faut dire que pour un Italien fraîchement sorti de son terroir, l'éléphant est assez effrayant.
Et encore, les Romains avaient la version "petite taille"...
C'est à Ausculum en 279 avant J-C qu'il remporte sa "victoire à la Pyrrhus". Son armée affronte l'ennemi pendant deux jours, et les deux adversaires perdent énormément d'hommes (des officiers surtout), selon Denys d'Halicarnasse 15000 de chaque côté. Pyrrhus aurait même dit, selon Plutarque : "Si nous devons remporter une autre victoire sur les Romains, nous sommes perdus" (Plutarque, Apophtegmes de rois et de généraux, « Pyrrhus », III). Preuve que c'était pas brillant. Bref, comme Hannibal après lui, il est à deux doigts de parvenir à Rome et cette "victoire" le décourage d'aller plus loin.
Pour faire court, il revient pendant trois ans en Sicile à la demande de Syracuse pour bouter les Carthaginois, ce qu'il fait plutôt bien. Après, il arrive à se mettre à dos ses alliés, notamment en flinguant le roi de Syracuse, ce qui n'est pas très malin. Ensuite de quoi, en 276 il est forcé de revenir en Italie, et il se fait couler 90% de ses navires pendant la manoeuvre, c'est bon signe pour la suite. Pas découragé, il attaque les Romains avec le reste de ses troupes, à Beneventum ("Bon évènement" en latin ; pas en grec, ça vous laisse présager l'issue de la bataille un peu) en -275. Si vous vous rappelez que Pyrrhus a gagné grâce à des éléphants, il faut se dire que pendant qu'il guerroyait en Sicile, les Romains eux ont eu le temps de se reconstituer, et de se préparer psychologiquement à rencontrer les fameux éléphants. Et pendant la bataille, ils leur balancent flèches et javelots, tant et si bien que les bêtes se retournent contre l'envoyeur, Pyrrhus. Bref, ce qui a favorisé ses victoires se retourne contre lui, et à la suite de cette bataille, il préfère "opérer un repli stratégique" ou autrement dit "se tirer chez lui comme un rat". La honte !
Moralité : si vous voulez combattre les Romains, arrêtez d'utiliser les éléphants, tous ceux qui ont essayé ont eu des problèmes, comme ceux qui prennent des avions pour Pau. Bon, il faut dire que le pauvre Pyrrhus n'a pas eu de chance en ayant cette renommée qui lui colle aux basques jusqu'à maintenant, mais bon, quand on connaît le déroulement de sa campagne on se dit qu'il était un peu idiot et belliqueux outre mesure. Donc, il l'a mérité, le boulet ! Cela étant, c'est principalement "à cause" de son talent que le paradoxe de ses défaites en Italie a eu tant de retentissement. Parce qu'après tout, bon nombre de généraux avant et après lui auraient pu rester dans l'Histoire pour une "victoire à la (...)", mais ils étaient sans doute plus habitués à se prendre des taulées.
Merci de votre lecture, j'espère que tout ça vous a plu, qu'il y avait pas trop de texte chiant et un peu d'images rigolotes pour ceux qui aiment, et inversement pour ceux qui aiment l'inverse.
Ave !
Comments
Primus
o/
o/
V+pas lu 😃
Mais ya pas d'images rigolotes 🙁
Et puis l'avion à Pau c'est vraiment une référence de merde 😮
Avant c'était les inconnus, le prochain c'est Anne Roumanoff ou pire 😁
À quand une référence à Kev Adams ?
n3v4
Ave ! V \o/
Survolé, mais ça semble tellement bien que je vote !!!
Merci 🙂
[removed]
BOUHHHHHHHHHHHH LES CONTREVERITES HISTORIQUES !
Je m'insurge ! C'est le train pour Pau, pas l'avion 😛
C'est juste, mais la relecture ou le revisionnage des sources m'a fait supputer qu'il parlait originellement des gens qui descendaient de l'avion en cours de route. C'est du moins ce qu'en dit l'historiographie classique 😃
un peu de rêve dans cet eMode de brutes!
Le titre de ton article, s'il est bien écrit en Latin, est faux. En effet, pour que le titre soit juste, il faut mettre non pas "Victoriam Pyrrhi", mais "Victoria Pyrrhi" (tout est dans la déclinaison et dans la fonction de "Victoria"), car Victoriam est l'accusatif de victoria,ae,f: la victoire; or l'accusatif latin correspond au C.O.D (Complément d'objet direct) français!
Mis à part cela, il y a encore une autre faute, mais cette fois de vocabulaire: Beneventum est le nom d'une ville, tu ne peux pas transcrire le nom d'une ville en une traduction, sauf en remettant le nom de la ville! De plus, même en suivant ton raisonnement, en décomposant Beneventum, on obtient Bene (adverbe): bien, et ventum qui est le supin de venio,is,ire,veni,ventum: venir et donc, si je traduis littéralement : "étant bien venu", soit "Bienvenue" en français correct.
Voilà tout, j'espère que je ne t'aurai pas trop embêté 😁
Sinon V+S
Oh, merci pour le titre, je t'avoue que j'ai fait la faute "involontairement", le titre originel ayant été tronqué. Mais merci de me l'avoir signalé du coup, j'étais passé à côté.
Pour "Beneventum" en fait, le fait est que les Romains ont renommé la ville comme ceci "Bon évenement" ("Ben" même si c'est pas la plus jolie graphie "Eventum"="s'étant produit") à la suite justement de cette bataille. Pour mémoire, le lieu s'appelait auparavant "Maleventum", donc c'est une ironie de l'histoire qui je trouvais allait bien dans mon petit récit. Sans l'explication plus détaillée, ça perd un peu de son sens j'en conviens.
Merci tout de même, j'adore les suggestion, et comme tu me l'as fait remarquer, l'erreur du titre.
suggestions* et sans doute d'autres mais je suis fatigué 😁
Voté comme toujours.
il est amusant de constater que la "victoire à la Pyrrhus" lui a donné une réputation de gros loser alors qu'en réalité il a unifier la macédoine et la Thessalie, rallier la Sicile pendant tout un moment. Il est vrai que Pyrrhus était pour le moins belliqueux. Sa biographie n'en finit pas de guerres. Il finira d'ailleurs par se faire tuer selon la légende par une vieille femme qui lui aurait balancer une tuile sur la tête lors d'un siège.
Article bien mené et instructif , tout ce que j'aime. Je tiens cependant à faire remarquer que l'épire se situerait plus vers l'albanie que vers la grèce.
Pour ce qui est des éléphants, Scipion l'Africain aura lui aussi l'occasion d'élaborer une tactique pour neutraliser ces bêtes de guerres. Selon les archives, les romains se seraient écartés pour former des travées afin de laisser les éléphants s'enfoncer. Une fois enfoncé, les romains s'époumonent dans leurs cors de guerres pour effrayer les éléphants. Effrayés les éléphants échappent au contrôle de leur dompteurs et se voient pilonner par des vélites disposé sur les cotés de la travée. Bref les hommes préhistoriques devaient sans doute des supercheries dans le même genre pour chasser els mammouths 😁. On peut donc dire que les Romains ont fait preuve d'une adaptation impressionnante au cours de leur histoire...
C'est clair ! Mais que veux-tu il aura pas été aussi génial que son tonton, c'est dommage pour lui. Pour le royaume d'Epire, oui c'est juste (il est pas le neveu d'alexandre pour rien d'ailleurs 😁), disons que je me préoccupe moins de la précision du détail, je suis pas devant une classe d'étudiants en licence 😛 mais merci, c'est cool de savoir que des gens suivent un peu au fond de la classe.
Quant à la fin de ton passage : chuuuuut 😛 dis pas tout, il me restera rien à écrire pour mes futurs articles. Cela dit, oui, on est d'accord pour les Romains, et dans un peu tout les domaines d'ailleurs. C'est pas pour rien que je les aime bien, pour le coup on peut dire que leur "civilisation est entrée dans l'Histoire" et à juste titre.
Merci 🙂
joli comme toujours 🙂
Et encore, t'as pas raconté sa mort qui est un epic fail.
C'est clair 🙂 mais la tuile n'étant pas romaine, c'est pas de chance pour lui ('huhuhu) 😁
J'ai une suggestion pour ton prochain article:
Une "biographie" d'Octave Auguste, car cette année on "célèbre" le 2ème millénaire de sa mort (14 après J-C), alors, intéressé?
Pas bête du tout tiens. Et ça va me faire un bien fou de me replonger dans sa vie à celui-là 😁
Content de voir que mon idée te plaise 😃
mais tu fais quoi de tes nuits, toi????
Vu que tu ne les occupe guère, je me console 😁